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Didactique de la musique électroacoustique

AUTHORS

  • Terrien Pascal

KEYWORDS

  • Didactique de la musique contemporaine
  • Musique électroacoustique
  • Analyse musicale
  • Émotions
  • Document type

    Abstract

    Ce numéro de Musimédiane repose sur le projet d’une didactique de la musique électroacoustique (Terrien, 2013) qui devrait permettre de mieux saisir les enjeux épistémologiques d’œuvres composées à l’aide des nouveaux outils numériques. Que ces œuvres soient intégralement électroacoustiques, mixtes, ou même d’une facture conventionnelle influencée par l’électronique (cf. Utsu-Semi, Yoshida, 1979), les outils de la didactique contemporaine permettent de saisir la nature du projet musical dans son intégralité. C’est dans ce sens que le projet d’une musicologie didactique (Terrien, 2017) cherche à réunir la compréhension du produit, l’œuvre, et la compréhension de l’environnement musical, social, émotionnel, qui a permis sa composition. Pour les non-initiés aux théories didactiques contemporaines, il serait fastidieux de leur imposer un long exposé sur les ancrages épistémologiques et des outils qui les caractérisent. Cependant parmi ceux-ci, l’analyste des musiques électroacoustiques gagnerait à faire un détour par la notion de transposition didactique qui permet au musicien-didacticien de dénombrer, en autant d’éléments qui la fonde, l’œuvre dont il cherche à percer les mystères. Mais ce dénombrement n’est pas suffisant s’il ne tient pas compte de ce qui entouré la composition de cette œuvre. Elle est le produit d’une mésogenèse (genèse de l’environnement), d’une topogenèse (genèse du rapport au savoir entretenu par le compositeur), et d’une chronogenèse (une genèse du temps) qui ont marqué les choix du compositeur. Ce triplet didactique révèle l’importance du vivant dans la création d’un artefact. En effet, comment considérer une œuvre sans considérer celui qui la compose et l’environnement sensible dans lequel il la compose ? Le projet de musicologie didactique veut créer des synergies entre les différentes sciences qui structurent la recherche sur le phénomène musical pour mieux enrichir nos connaissances sur la musique. Il ne s’agit pas confondre les cadres théoriques et méthodologiques, mais de les mettre co-action pour essayer de saisir l’essence d’une œuvre. Ce numéro tente d’apporter une contribution à cette réflexion en proposant trois articles d’analyse sur des œuvres électroacoustiques ou mixtes (N. Munck ; C. Vitale), dont un essai de transcription (J.-L. Di Santo), une réflexion sur ce que pourrait être une science de l’analyse musicale (J.-L. Leroy), et une approche croisée et contextualisée (musicologique, sociologique et didactique) sur un opéra Nô (P. Terrien & F. Lethurgez). Nicolas Munck a travers l’analyse de Trace IV, extrait du cycle Traces (2004-2020), du compositeur et chef d’orchestre argentin Martin Matalon aborde la question mésogénétique de la composition d’une œuvre comme processus de création. L’étude sur le travail du matériau sonore et de son traitement électroacoustique met en évidence les grandes lignes d’une typologie de l’environnement électronique et de ses interactions avec l’écriture instrumentale. Les exemples convoqués par Nicolas Munck permettent de questionner quelques aspects de l’esthétique du compositeur, esthétique qui se construit en grande partie sur cette dialectique acoustique/électronique. Claudio Vitale analyse la section centrale (D) de l'œuvre Styx (1984), pour deux pianos (huit mains), du compositeur François-Bernard Mâche. Il y étudie les relations de hauteurs, les aspects concernant la densité rythmique et la forme, ainsi que les liens entre les processus utilisés pour créer une illusion perceptive. Concrètement, les montées, descentes et accélérations permanentes produisent sur l’auditeur la sensation d'un processus (un cycle) qui pourrait être répété à l'infini. Raisons pour laquelle Claudio Vitale explique que Styx, dans la tradition d'œuvres et d'études expérimentales comme l'escalier de Penrose, les gravures d’Escher, la gamme de Shepard, les expériences de Jean-Claude Risset, et quelques musiques de Ligeti, crée ces effets d’illusion. Ceux-ci sont soutenus par la transformation progressive du matériel sonore. Jean-Louis Di Santo propose une étude de transcription de l’œuvre Bernard Parmegiani de Incidences/Résonances (1975), dont le compositeur disait vouloir « conserver un principe unique d'écriture » et « éviter la monotonie ». L'objet de cette analyse est de mettre en évidence comment le compositeur a mis en œuvre le principe de thème et variations. Pour cela, Jean-Louis Di Santo utilise comme support visuel un système de notation du son fondé sur les critères perceptifs tels qu'ils ont été définis par Pierre Schaeffer, appelé « acousmoscribe ». Jean-Luc Leroy travaille le statut de l’analyse musicale qui a connu des statuts variés depuis son émergence et selon les champs où on l’a exercée ainsi que les fonctions qu’on lui a fait tenir. Il retrace comment selon le mouvement général, elle a servi de support à des approches se réclamant d’une « objectivité » qui tirait sa légitimité d’une « neutralité » qui excluait de fait l’être humain en tant que sujet. Il s’agit d’une réflexion succincte sur cette évolution et ce positionnement en général. Enfin, Pascal Terrien et Florence Lethurgez croisent leurs cadres théoriques et méthodologique pour réaliser une analyse croisant les travaux en psychologies des émotions, ceux en sciences de l’information et de la communication, et ceux en musicologie didactique. Leur approche étudie l’approche sémiologique du processus créatif par ce qui se joue entre les signes, les objets et les pratiques compositionnelles et narratives. Mêlant l’étude de l’analyse des particelles à celles des notices d’un opéra Nô, Sumidagawa (2008), ils détaillent deux processus dynamiques anthropologiques de création musicale, l’un en entrée, où les émotions inspirent le projet, l’autre en sortie, où elles sont « composées », pour en saisir la réalité des transformations communicationnelles.

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